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Nos confinements

On pourrait se focaliser sur les pénuries, notre peur, la mort, la colère. On pourrait naturellement penser aux nombreux projets/mariages/anniversaires annulés, à l’angoisse de pas être à la hauteur de l’école à la maison, accoucher sans lui, sans elle, de rester seul(e), coincé(e) avec quelqu’un que l’on n’aime plus, de se retrouver en proie à ses démons, de voir ses proches tomber malades, nous décevoir, partir. On pourrait penser aux réprimandes, aux délations, aux jugements. Au personnel médical qui tombe malade peu à peu ou baisserait les bras, faute de moyens, de soutiens, terrassés par la fatigue. Céder à la crainte de ne pas réussir à garder son travail, survivre à ce chômage partiel ou maintenir son entreprise à flots…. On pourrait… On pourrait ? Et puis quoi ? On s’est cassés la gueule oui. Mais…
On est là. Dans le camp des vivants, ceux qui se battent et décident de voir le beau, goûter le sucre et toucher la flanelle. Se relever. Qui ont choisi d’applaudir ou non, de continuer à rire et pleurer, profiter de chaque instant presque comme si c’était le dernier et continuer à s’engueuler, faire l’amour, tracer des projets quand certain(e)s mettent chaque jour leur santé et celles de leurs enfants, de leurs proches en danger. Pour que nos vies continuent, même entre 4 murs.
Alors oui, j’ai peur et j’ai un peu le sentiment d’être devenue mes parents, quand ‪à 20h‬ j’allume le journal tv en sourdine mais… Si on y regarde de plus près ? Je ne crois pas que j’appellerais autant ma mère pour prendre de ses nouvelles alors même qu’elle ne garde pas mes enfants 🙊 Je ne crois pas que j’apprécierais autant les messages flous de mon papa, que je regarde d’ordinaire du coin de l’oeil parce que je ne n’ai jamais le temps pour lui et les tulipes multicolores de son jardin… moi qui ne vois pourtant que du bitume. Je n’aurais pas assisté à ses premiers mots lus, à la joie sur son visage et les larmes d’émotion dans ses yeux parce que lire, c’est être libre, mon grand, je sais. Je n’aurais pas entendu ses premiers mots parfaitement prononcés puis ses messages distinctement formulés. Oui, je te comprends ma puce, on se parle toi et moi. C’est dingue tout ce que je rate, depuis 2 ans.
Si on y regarde de plus près ? Je suis un petit témoin, privilégié, placé aux premières loges d’une fraternité qui se lie d’amour et de souvenirs pour toujours, même sur fond d’apocalypse. Cette planète qui arrête de tourner. Ces imaginations qui n’ont de cesse de s’envoler. Je m’en « fiche » que le temps soit mis sur pause tant que vous riez, que la terre prend enfin le temps de respirer, les hôpitaux de se dégorger. Ce que je veux vous dire mes Odette, c’est que mon monde à moi, je décide de choisir qu’il va vivre et continuer. Malgré les difficultés perso, pro, grâce à eux bien sûr… mais aussi grâce à vous.
Je le vois, le sourire de mon vigile adoré du Monop d’en face, impossible à dissimuler, même derrière son grand masque et ses gants de plastique inquiétants. Je les entends, les rires communicatifs de nos éboueurs qui serrent mon coeur quand je les vois débouler façon chevaliers des temps modernes quand ils passent dans le quartier. Je les vois vos gambettes mes chers voisins, qui dégoulinent de vos fenêtres où vous estropiez vos fesses sur 5cm de faux balcon que vous prenez comme moi, pour une terrasse grand luxe. Je vous aime vous qui à la maison faites vos pains maison (🤣), des plats dignes des plus grands restos, redoublez d’ingéniosité, glandez au soleil avec votre chat, déprimez sur des scenarii à faire froid dans le dos, continuez à dater virtuellement sur Tinder avec les plus romantiques des échanges et partages que vous auriez imaginés, briquez votre maison et vos carreaux comme jaja. Je vous aime pour vos leggings, vos beaux yeux derrière vos masques, vos outfits du dimanche tous les jours et vos chaussettes sur vos mains #truestory. Je n’oublierai jamais ce petit poisson d’avril fait main par un enfant que je ne connais pas collé à la porte de ma maison, les « comment tu vas ? » sortis de coeurs généreux insoupçonnés, les commandes chaque jour pour pas qu’on tombe trop fort. Big up à vous, mes inconnus du quotidien, virtuels ou non :
vous êtes la plus poétique des réponses à ce fléau des temps modernes. Mon beau, mon sucre et ma flanelle, vraiment, n’en doutez pas, c’est vous.

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